Omer s’était levé tôt. Tôt pour Omer Eriksson autant que pour un videur qui bossait de nuit. Il n’avait pas regardé l’heure. De toute manière, l’horloge de son appartement avait récemment décidé de rester coincée à 16h40. Bougon, il avait enfilé un sweatpant et, comme tous les matins depuis… il jeta un regard à son porte-clé pour vérifier depuis combien de temps s’était passé depuis sa plus récente rechute. Comme tous les matins depuis qu’on le lui avait fortement suggéré, donc, il se préparait à faire un petit footing. Se tenir occuper pour mieux s’occuper de sa santé physique et mentale, lui avait-on dit. On s’était également pris un regard carnassier en plein visage. Il était en pleine forme, après tout, mais personne n’osa lui dire qu’il y avait une différence entre ceci et la santé.

Son parcours l’amena au parc où, depuis quelques jours, ou semaines, on s’affairait. Il avait bien compris qu’il se tiendrait une espèce de fête foraine, mais la date prévue lui avait totalement échappée : il préférait ranger d’autres types de renseignements dans son crâne. De toute manière, la réponse lui apparut d’elle-même : à voir la quantité de gens qui s’affairaient dans cette direction, et l’ambiance générale à la fête, il n’y avait pas de doute qu’aujourd’hui se tenait le festival.

Après avoir épongé de la manche de sa veste la sueur qui perlait sur son front, le tatoué soupira profondément, un grognement en filigrane. La voix de son sponsor semblait résonner à ses oreilles, lui suggérant de rencontrer des gens et de sauter sur l’occasion pour sociabiliser. À contrecoeur, il changea à la fois d’allure et de direction. Le new yorkais se coiffa avec ses doigts et, dès qu’il fut suffisamment près pour identifier les petits stands, en chercha un qui vendrait de la bouffe. Il ne serait pas contre une petite gaufre ou un beignet. Ce n’était pas dans ses habitudes de manger d’aussi bonne heure, mais ce n’était pas non plus dans ses habitudes de prendre des bains de foule.

Les mains dans les poches, les coudes loin du corps et le pas conquérant, il arpentait les allées à la recherche de quelque chose qui attirerait son attention. Ce quelque chose se trouva être quelqu’un, et Omer se sentit un peu con de ne pas avoir réalisé qu’il risquait de tomber sur quelqu’un qu’il connaissait déjà. Il balança un signe de tête sec et exempt d’émotion à la personne.